Après un discours prononcé en 2012 au Maroc, j’ai choisi cette année de m’adresser aux français depuis le Cap-Vert. Meilleurs vœux républicains à toutes et tous.
Monsieur l’ambassadeur, Mme Barbry,
Monsieur le consul adjoint,
Amis Cap-verdiens,
Mesdames et Messieurs,
Mes cher(e)s compatriotes,
C’est un plaisir et un honneur pour moi de prononcer ce discours devant vous.
Le 14 juillet n’est pas un jour comme les autres. On célèbre une Révolution, et cette fête doit être moins une commémoration qu’une façon de nous dire que nous n’avons jamais fini de nous battre pour la liberté, l’égalité, la fraternité. Autrement dit, la Révolution de 1789 n’est pas achevée. Elle est, comme aimait le chanter Georges Moustaki, notre Bana[1] à nous, une « Révolution permanente ». La dignité des Hommes, remise avec fracas à l’ordre du jour par les peuples et les sociétés civiles, reste la force motrice de cette belle Révolution.
Ici, au Cap-Vert, on sait peut-être plus qu’ailleurs, ce que la dignité veut dire. 40 ans après l’assassinat d’Amilcar Cabral[2], chacun sait que c’est ici et sans doute nulle part ailleurs qu’un peuple esclave inventa sa propre identité et fonda une des démocraties les plus remarquables au monde. Une démocratie qui fonde sa République sur la Tolérance. Je souhaite donc d’abord longue vie au Cap-Vert, à son peuple, à sa Culture.
Je le fais d’autant plus volontiers que des inquiétudes se font jour : le Cap-Vert, qui a surmonté tant de difficultés et a su fonder un des régimes parlementaires les plus respectables, est encore menacé par la précarité de son économie, encore trop dépendante de l’extérieur. Je sais par exemple que le changement de catégorie – de « Pays les moins avancés » à « Pays à Revenu Intermédiaire » – est à la fois une fierté, car le résultat des efforts fournis par le pays, et une crainte, car elle signifie demain une baisse significative des aides budgétaires internationales. C’est un peu comme si on coupait les ailes de la Passarinha avant qu’elle ne prenne son envol… Les rendez-vous que nous avons demain avec les plus hautes autorités du pays et de la ville de Praïa reviendront sans doute sur ces interrogations et sur d’autres aspects de notre coopération, qu’ils soient culturels ou économiques. Je sais donc déjà que je retournerai en France avec quelques messages à l’attention de notre gouvernement.
Je continuerai aussi pour ma part à plaider pour l’accompagnement des stratégies d’union et d’intégration africaine. Elles sont indispensables pour que demain l’Afrique pèse dans cette mondialisation dont elle a été trop souvent l’oubliée. Cette stratégie globale aurait du sens entre maghrébins, elle aurait du sens aussi par le renforcement de la Cedeao.
Dans notre circonscription, cette ambition a d’autant plus de pertinence que beaucoup de pays ont conquis la langue française et en font de plus en plus un moyen de rapprochement et d’échanges, y compris économiques. La langue française peut être un formidable trait d’union entre des peuples et des cultures différentes, pour peu qu’on la cultive et qu’on l’encourage. Je sais que le Cap-Vert est un pays lusophone, mais je tiens à saluer sa détermination à faire du français une langue d’enseignement active, au même titre que l’anglais. À n’en pas douter, cela peut constituer une chance pour nous tous et pour les jeunes du Cap-Vert d’abord car des débouchés économiques existent aussi en Afrique francophone.
Amis Cap-Verdiens qui êtes ici, vous comprendrez que je m’adresse maintenant à mes compatriotes, à ces français – plus de 400 – qui vivent ici en amis.
Voici donc un an que j’ai été élu député de cette 9ème circonscription, qui rassemble 16 pays et 140 000 français. Du Mali à la Tunisie, de la Libye à la Côté d’Ivoire, de la Guinée au Maroc, de l’Algérie au Niger, du Burkina au Sénégal…notre circonscription ne ressemble pas tout à fait à un long fleuve tranquille. Cela explique, et j’espère que vous m’en excuserez, que je ne sois pas venu plus tôt vous rendre visite.
Je disais tout à l’heure que la Révolution française n’était jamais achevée et la représentation parlementaire des français de l’étranger est venue apporter sa pierre à notre édifice républicain : en effet, pour la première fois depuis 1789, nos compatriotes résidant à l’étranger sont désormais, par leur vote, dépositaires de la souveraineté nationale comme tous ceux qui vivent en France. Nous avons donc pris exemple sur le Cap-Vert, qui a déjà depuis longtemps mis en œuvre cette avancée démocratique de représentation, au sein de son Assemblée, de ses expatriés. Dans cette législature, l’enjeu est donc que chaque loi s’interroge sur la prise en compte, dans ses dispositions, de nos compatriotes établis hors de France.
Par exemple, que la loi sur la refondation de l’école n’oublie pas nos établissements à l’étranger ; que la prochaine loi sur les retraites trouve des débuts de solution pour celles et ceux qui retournent au pays après avoir longtemps cotisé à l’étranger. Mais je veux aussi être un relais, même quand certaines de vos préoccupations ne relèvent pas de la loi.
Car plaider pour les français de l’étranger c’est aussi faire comprendre, en France – au gouvernement comme aux français dans leur ensemble – qu’ils sont une chance pour la France, qu’ils sont les meilleurs ambassadeurs de notre culture, de notre langue, de nos intérêts aussi parfois. Ils sont, surtout, les acteurs directs des coopérations entre nos pays.
Je veux donc saluer ce que vous êtes, ce que vous faites pour renforcer, par le lien concret et humain, l’amitié entre nos deux peuples. Je veux aussi saluer celle et ceux qui, dans cette école, au sein de l’Ambassade, avec les services du Consulat ou encore à travers les actions de l’Institut français, œuvrent chaque jour dans ce double objectif de vous servir et de servir la relation franco-capverdienne.
Je sais que nous ne sommes pas le 31 décembre, mais le 14 juillet c’est un peu l’an I de la Révolution. Alors, à toutes et tous, j’adresse mes vœux de bonheur. Ensemble, souhaitons la meilleure des fortunes à notre idéal républicain et fraternel.
Vive le Cap-Vert, vive l’amitié franco-capverdienne
Vive la République, vive la France.