Dans la suite des débats budgétaires en hémicycle, je suis intervenu à deux reprises pour soutenir et appuyer les amendements que nous avons déposés.
Le CICE a aujourd’hui pour objet le financement de l’amélioration de la compétitivité des entreprises à travers, notamment, des efforts en matière d’investissement, de recherche, d’innovation, de formation, de recrutement, de prospection de nouveaux marchés, de transition écologique et énergétique et de reconstitution des fonds de roulement. L’amendement 317 proposait de supprimer le mot « notamment » afin d’éviter que le CICE soit exclusivement destiné à améliorer les facteurs objectifs de compétitivité qui sont listés dans la loi.
« On dit que le vocabulaire pourrait prêter à confusion. Mais on ne peut pas centrer toute une politique sur la baisse permanente du coût du travail, car il s’agit de gens, de salariés, de travailleurs, d’ingénieurs, de techniciens. On ne peut pas dire simplement qu’ils coûtent cher et qu’ils sont un poids pour la société.
Si l’on veut rechercher les meilleurs facteurs de compétitivité, il faut sans doute, à défaut de poser des exigences, notamment de remboursement en cas de mauvaise utilisation de l’aide publique, au moins en amont organiser un fléchage explicite pour que les entreprises, qui ont besoin de visibilité, sachent exactement pour quel type de stratégie industrielle elles seront aidées. Cela éviterait des distorsions de concurrence, y compris entre des entreprises d’un même secteur, certaines bénéficiant du CICE alors qu’elles n’en ont pas forcément besoin tandis que d’autres, qui sont beaucoup plus fragilisées, en étant réduites à l’utiliser simplement à travers leur fonds de roulement pour réorganiser leur trésorerie.
Je pense que ce sont des aspects de rationalité, qu’une économie a besoin parfois de critères et qu’elle ne peut pas simplement fonctionner sur des aides accordées à l’aveugle sans un minimum de conditions. Ce ne sont pas des amendements qui coûtent plus cher. Au contraire, ils mettent de la clarté dans l’efficacité de la politique. »
L’amendement déposé par Eva Sas (EELV) visait à renverser la logique initiale en asseyant le CICE non plus sur les rémunérations et la masse salariale, mais sur les dépenses de celles-ci selon l’exemple du crédit d’impôt recherche.
« Lors du premier débat sur le crédit d’impôt compétitivité emploi, comme l’a rappelé Dominique Lefebvre, nous avons été un certain nombre de parlementaires à pointer les risques de dévoiement de cette aide fiscale à des fins pouvant poser problème, notamment pour des surrémunérations de dividendes ou pour une augmentation des revenus. Cela pose évidemment divers problèmes, notamment de moralité, compte tenu de la crise et des efforts demandés parallèlement aux Français.
Cet amendement n’avait pas été retenu mais nous en présentons d’autres qui, au-delà des principes qui avaient été définis lors du premier débat, se fixent des objectifs de clarté, de transparence, de moralité, de respect de ce qui est exigé des Français ainsi que d’efficacité. Il s’agit, comme l’a indiqué Eva Sas, non pas d’une aide calculée en fonction de la masse salariale des entreprises, c’est-à-dire une aide à l’aveugle, indifférenciée, mais d’un fléchage précis correspondant à des politiques concrètes de réindustrialisation et de renforcement de notre appareil productif. Cela concerne notamment la modernisation des machines-outils, les dépenses d’innovation, de recherche et de développement, l’accompagnement de nos entreprises à l’exportation, notamment celles qui sont soumises à la concurrence internationale, ou les dépenses liées à la protection des brevets.
Enfin, j’insisterai sur un dernier point : la cohérence avec la politique gouvernementale. Le Gouvernement a décidé, à juste titre, d’insister dans sa stratégie de réindustrialisation sur trente-quatre filières industrielles prioritaires. Il serait utile d’intégrer cette dimension dans toutes les aides que nous apportons à nos entreprises, afin que celles qui relèvent de ces priorités industrielles affichées puissent bénéficier des accompagnements correspondants.
Trois aspects doivent donc être pris en compte dans ce débat : la moralité et la généralisation des devoirs attendus de n’importe quel acteur de la société, qu’il soit un individu ou une entreprise, l’efficacité et enfin la cohérence.«