L’épreuve du budget : le refus du compromis pour ne pas taxer les riches.

L’examen du budget 2026 s’est ouvert dans un climat que nous n’avions jamais connu : démission, nomination, nouvelle démission puis reconduction du gouvernement, motion de censure, menace de dissolution… En macronie, l’embrouille est reine, tant que le Président conserve l’essentiel des pouvoirs, malgré les choix électoraux.

À toute chose malheur est bon : contraint par la gauche et les écologistes, le Gouvernement s’est engagé à ne pas recourir au 49.3. Pour la première fois depuis tant d’années marquées par la normalisation de l’usage de cet article et la mise au banc du Parlement, les députés pourraient réellement débattre du budget de la Nation. 

Avec mon groupe, j’ai alors abordé cette séquence avec une ambition : obtenir les avancées utiles pour le pays auxquelles Emmanuel Macron s’était si souvent refusé, en matière de justice fiscale, de services publics, d’écologie ; et un devoir : empêcher les régressions sociales dont les seuls bénéficiaires sont les plus fortunés.

Et pour cause : le projet présenté par le Gouvernement Lecornu restait très largement celui préparé auparavant : près de 6 milliards d’euros de coupes, gel du barème de l’impôt sur le revenu, fiscalisation des indemnités journalières versées aux personnes en affection longue durée, suppression anticipée de la CVAE privant les collectivités de plus d’un milliard d’euros. À cela s’ajoutent la suppression des APL pour les étudiants étrangers ou encore la hausse des frais d’accès à la nationalité. Et, surtout, une obsession incompréhensible : ne jamais faire porter aux plus riches et aux super actionnaires la charge du devoir de solidarité… En somme, une politique d’austérité doublée d’un discours xénophobe.

Pourtant, très vite, les masques sont tombés. Derrière les apparences d’ouverture, les appels au compromis et aux responsabilités partagées, le Premier ministre et son Gouvernement, soutenus par une droite coalisée de Renaissance au Rassemblement national, se sont dressés comme un seul bloc pour refuser toute avancée en matière de justice fiscale. 

L’exemple de la taxe Zucman en est l’illustration la plus nette. Le patrimoine des 500 plus grandes fortunes est passé de moins de 10 % du PIB en 2010 à près de 40 % en 2024. Nous proposions la contribution de 2 % sur cette concentration inédite de richesses qui rapporterait 20 milliards d’euros par an. Comment écarter une telle ressource dans la situation budgétaire actuelle ? C’est pourtant cette voie qui a été majoritairement choisie : préserver les milliardaires, quoi qu’il en coûte.

À cette obstination s’ajoute une autre réalité, tout aussi révélatrice. Celle des mesures dilatoires entreprises par le Gouvernement. À l’approche des échéances constitutionnelles, nous devions siéger tout le week-end des 15 et 16 novembre, de 9 heures à minuit. Contre l’avis des députés, le Gouvernement a annoncé la fermeture de l’hémicycle dès le vendredi soir et l’annulation des séances prévues ce week-end, renvoyant la reprise des débats au lundi et réduisant mécaniquement le temps du débat parlementaire. Cette décision en dit long des intentions de l’exécutif, et ne laisse rien présager d’une issue constructive. 

Quant au décalage de la réforme des retraites, il permettra à plusieurs centaines de milliers de personnes nées entre 1964 et 1968 de partir plus tôt. Même si la mesure est minime, c’est pour la première fois, un prolongement législatif du mouvement social du printemps 2023, je l’ai donc approuvée.

Ce vote ne préjuge en rien de ma position finale sur le budget. Si nous avons fait retirer les mesures les plus injustes du PLFSS – notamment les dispositifs anti-étrangers, le gel des pensions de retraite et prestations sociales, ou les déremboursements –, la partie recettes laisse la Sécurité sociale en déficit et fait peser son redressement sur les classes populaires. Ce déséquilibre devra être corrigé.

La suite de l’examen sera donc décisive. PLF et PLFSS doivent encore évoluer pour ne pas affaiblir davantage nos hôpitaux, nos écoles, nos services judiciaires, nos collectivités et la capacité d’action de l’État. Je continuerai de défendre nos priorités : justice fiscale, services publics, transition écologique, solidarité. Je vous tiendrai informés de la suite des débats.