Les grands défis de coopération, absolument prioritaires au regard du réchauffement planétaire irréversible, sont relégués au second plan de l’agenda des puissances. Face aux vents mauvais soufflés par les aficionados du surarmement, du capitalisme prédateur, de l’autoritarisme et du climatoscepticisme, nous avons la responsabilité d’aller au-devant et de construire une nouvelle donne progressiste internationale.
A mesure que l’extrême droite appose son cachet sur nombre de démocraties libérales – en Europe, aux Etats-Unis, en Argentine, mais aussi en Inde – la bascule dans l’illibéralisme se mue en internationale néofasciste. Le camp de l’émancipation – qui s’appuie d’abord sur une société mobilisée et engagée pour l’égalité et la connaissance – assiste impuissant à l’assaut frontal contre la pensée critique, à la dénégation des droits des minorités et à l’avènement des techno-césaristes, dotés de capacités technologiques et de moyens financiers jamais vus dans l’Histoire.
Rancœurs des peuples
Les démocraties d’Europe sont prises en étau et même gangrenées. La Russie coupable de l’agression contre l’Ukraine et forte de ses influences hongroises et slovaques déstabilise toutes les opinions ; de l’autre côté, les Etats-Unis (qui ont leurs relais à la tête de l’Italie et de la Pologne) choisissent l’affrontement commercial et l’abandon militaire. Mais au fond, l’Europe est aussi prise au piège des rancœurs des peuples qu’elle a nourries par ses promesses non tenues, ses persistances néocoloniales ou son application à géométrie variable du droit international.
Les stratégies d’alliance sont à l’agenda de toutes les extrêmes droites : réunies à Montargis en France le 9 juin à l’invitation de Jordan Bardella, elles sont aussi impliquées dans une stratégie de coordination dont le programme de la Héritage Foundation est un des plus avancés.
Les sols craquent : Roumanie, Autriche, Pays-Bas… les nuages approchent à grande vitesse de l’Allemagne, de l’Espagne et de la France, sans doute la plus fragile par l’implantation de l’extrême droite mais aussi la plus dangereuse, le cas échéant, au vu de ce que son présidentialisme absolu peut faire craindre de l’exercice du pouvoir des droites radicalisées.
Passion de l’égalité
Vient pour nous – démocrates, humanistes, écologistes – l’urgence de nous fédérer pour résister et construire la Digue, celle qui vient en appui des combats qui irriguent la société, de ces luttes sociales qui font écho à notre passion de l’égalité et à notre confiance en la raison. La fatigue des anciennes internationales socialistes ou altermondialistes n’est plus un obstacle à leur renouveau. Cette Digue, c’est d’abord un réseau d’amitié transnational, composé d’élu·es, d’activistes des grandes causes de l’écologie ou des identités minorées, de journalistes, de chercheurs. Ils sont cette première ligne : bafoués, arrêtés et même assassinés.
Nous partons à leur rencontre, pour comprendre ce que signifie concrètement un agenda politique réactionnaire. Aux Etats-Unis, où immigration, féminisme, droits sociaux génèrent ces passions tristes et violentes usant des bras armés de polices sans retenue. En Hongrie, en soutien aux mouvements LGBT interdits de fête, aux médias et aux juges mis sous coupe depuis près de dix ans. En Argentine, où la tronçonneuse remplace l’impôt.
Les 15 parlementaires fondateurs de la Digue – issus de plusieurs groupes et de plusieurs chambres (Sénat, Assemblée nationale, Parlement européen) –, que d’autres rejoindront, se rendront également là où les forces progressistes l’ont emporté face au pire : en Espagne, au Portugal, au Brésil surtout – après les années Bolsonaro.
Fédérer les consciences déjà mobilisées, engager les corps et les esprits pour ne jamais se résigner face à ce qui pourrait être empêché : voilà ce qui nous mobilise.
Rendez-vous au Festival des Idées organisé, du 4 au 6 juillet à la Charité-sur-Loire : plus de 30 rendez-vous pour débattre des défis culturels et politiques de demain. La plénière d’ouverture le 4 juillet sera consacrée à notre initiative : Le cauchemar des empires, le réveil des démocraties.