Le projet de loi relatif au droit des étrangers (hors tourisme) a été discuté en première lecture à l’Assemblée Nationale. Ce débat, depuis longtemps nécessaire, n’a malheureusement pu avoir pleinement lieu à une telle date (fin juillet). La crainte et les peurs laissent donc perdurer les préjugés qu’il est pourtant, plus que jamais, nécessaire de faire reculer… En effet, depuis près de dix ans, la politique migratoire en France s’est considérablement durcie. La politique du chiffre des reconduites à la frontière, fut non seulement injuste pour de nombreuses personnes mais aussi inefficace qu’épuisantes pour nos services de police. L’approche qui prévaut est en effet est absurde et même irresponsable :
– en premier lieu parce que l’essentiel des personnes migrantes en France sont dans des parcours d’allers et retours et n’ont en rien des motivations d’installations durable (ce qui d’ailleurs, j’y reviendrai, n’est pas forcément un problème en soi, pour peu que nous si-oyons en capacité de les accueillir, j’y reviens plus loin). De ce point de vue, le développement des visas de circulation engagée depuis 2012 va dans le bon sens, même s’il reste encore insuffisant. Désormais, des chercheurs, des scientifiques, des ingénieurs, des techniciens, des chefs d’entreprises etc. disposent généralement de visas d’une durée d’autorisation d’aller et venue égale à la durée d’expiration de leur passeport ;
– ensuite, parce que la France – qui, contrairement aux fantasmes xénophobes véhiculés régulièrement, est l’un des pays d’Europe qui accueille le moins d’étrangers par rapport sa population totale – ne gagnera qu’à s’enrichir de la culture, du travail, de nombreuses personnes qui, demain, seront peut-être de nouveaux français, consolidant ainsi un peu plus notre creuset républicain ; (bien sûr, les pouvoirs publics doivent pour cela s’en donner les moyens). La France accueille environ 200.000 nouveaux immigrants réguliers chaque année, soit 0,3% de sa population, un des chiffres les plus faibles de l’OCDE. La moitié sont là pour des raisons familiales, 60.000 pour des études, 20.000 pour des raisons humanitaires (réfugiés, malades, etc) et à peu près autant dans un but professionnel. Les démarches demandés aux migrants sont un véritable parcours du combattant…
– enfin, parce que la peur du migrant (et particulièrement celui qui a réussi à traverser le cimetière méditerranéen) est entretenu par ceux-là même qui ont provoqué leur exode : l’intervention responsable en Libye en particulier, désormais en chaos, a rajouté au malheur des femmes et des hommes, une déstabilisation sans précédent de la Région. Les conflits de la zone subsaharienne, jusque la corne est-africaine sont source de fuites, de déplacements et de mobilité contraintes ou désespérée pour des centaines de milliers de femmes et d’hommes. Et cela continuera ainsi tant qu’une stratégie concrète de reconstruction d’États en faillite ne sera pas déployée, en lien avec les sociétés civiles.
Ces questions restant posées, nous aurons à construire une politique qui améliore l’accueil des étrangers, facilite leur mobilité et permette le respect des droits fondamentaux de chacun des demandeurs, dans l’intérêt des individus et du progrès collectif. Reste à juger des dispositions de cette nouvelle mouture d’une loi sur le droit des étrangers débattue la semaine dernière.
Même si nous restons dans une vision très frileuse et parfois même très inquiétante sur l’accueil des étrangers, le travail parlementaire a permis de faire évoluer le texte positivement :
– Le projet de loi généralise le titre de séjour pluriannuel après une présence légale en France d’un an, ce qui constitue une amélioration administrative ; néanmoins les obligations fixées dans le parcours d’intégration sont, comme le rappelait mon collègue Pascal Cherki, incertaines, subjectives et potentiellement sources de contentieux inefficaces.
– En guise de simplification, un « passeport talents » remplace les 6 titres existants afin de faciliter le séjour des étudiants, et professionnels qualifiées en France. Ce titre unique sera donc désormais ouvert aux étudiants (pour la durée de leurs études), aux investisseurs, aux chercheurs, aux artistes et aux salariés ainsi qu’à leurs familles pour un séjour de 4 ans maximum.
– Enfin, le texte consacre la naturalisation automatique des enfants nés à l’étranger, de parents étrangers, ayant un frère ou une sœur français et résidant sur le territoire depuis l’âge de 6 ans
Le texte reviendra en seconde lecture à l’Assemblée après un examen au Sénat. Avec mes collègues, je ne manquerai pas de déposer de nouveaux amendements pour améliorer … encore le projet de loi.