Tribune

Éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle : la désinformation n’a pas sa place au gouvernement

Alors que le procès des viols de Mazan dévoile l’ampleur de la culture du viol et des violences sexistes et sexuelles dans notre société, alors que le rôle clé de l’éducation y est rappelé par l’avocate générale dans son réquisitoire : « vous nous guiderez dans l’éducation de nos fils, car c’est par l’éducation que s’impulsera le changement », il est totalement inacceptable que des ministres se fassent cheval de Troie des réactionnaires, contre l’intérêt des enfants de ce pays.

Interrogé le 27 novembre au Sénat sur le programme d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS) conçu par le Conseil Supérieur des programmes de l’Education nationale, le ministre délégué démissionnaire Alexandre Portier, chargé de la réussite scolaire et de l’enseignement professionnel, a repris l’argumentaire des mouvements conservateurs et réactionnaires anti-choix. Il a affirmé qu’il s’engagerait « personnellement pour que la ‘théorie du genre’ ne trouve pas sa place » dans nos écoles.

Qu’est-ce que le ministre trouve inacceptable exactement ?

Que l’EVARS soit un des outils les plus efficaces pour prévenir, détecter et prendre en charge les violences sexuelles, notamment l’inceste ? Pourtant, elle permet aux élèves d’apprendre leurs droits et de pouvoir dire les violences, alors que la CIIVISE estime que 3 enfants par classe subissent de l’inceste.

Est-il inacceptable que l’EVARS permette de répondre aux questions des élèves, alors que deux enfants de moins de 15 ans sur trois ont déjà eu accès à des images pornographiques ? Dans ces séances sont discutés le droit à l’intimité, le respect du consentement, la réciprocité, l’égalité.

L’EVARS permet aux élèves de poser toutes leurs questions sur la santé sexuelle et reproductive et de lutter contre le harcèlement et le cyberharcèlement, alors que la moitié des élèves témoignent avoir subi des violences répétées, et que les violences contre les personnes LGBTQIA+ ont augmenté de 13% en un an. Alors même que la santé mentale des jeunes, des femmes et des personnes LGBTQIA+ se dégrade et inquiète.

L’EVARS est un outil essentiel et puissant pour une école qui rend heureux et émancipe, loin des mensonges agités par les lobbys anti-droits et anti-choix pour effrayer les parents. Une députée d’extrême droite est même allée jusqu’à expliquer dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale que les manuels d’éducation “initient [les enfants] à la pratique de l’anulingus” ou “expliquent l’art de la fellation pour arriver à l’orgasme” à des adolescents. Ces propos totalement délirants sont le produit du lobby des mouvements d’extrême droite. Ils nuisent gravement à l’éducation des enfants et des jeunes.

Or, il y a urgence. Moins de 15% des élèves bénéficient de l’EVARS alors que la loi prévoit depuis 2001 trois séances d’éducation obligatoires par an pour chaque élève. La communauté éducative est unanime pour condamner ce non-respect, et les associations dénoncent le manque de moyens pour répondre à une demande qui ne cesse de croître. Le programme

qui sera présenté le 12 décembre au conseil supérieur de l’éducation est attendu de longue date.

Nous demandons à ce que le calendrier suive son cours. Nous appelons à ce que le contenu élaboré par des experts pédagogiques ne soit pas censuré, modifié ou dévoyé par des militants réactionnaires fanatiques. Nous demandons à ce qu’enfin les élèves de ce pays bénéficient des séances d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle, tel que la loi le prévoit et l’exige.

Signataires

Mathilde Panot, députée du Val-de-Marne ;

Sarah Legrain, députée de Paris

Nadège Abomangoli,députée de Seine-Saint-Denis

Manon Aubry, eurodéputée

Eric Coquerel, député de Seine-Saint-Denis

Clémence Guetté, députée du Val-de-Marne

Aurélie Trouvé, députée de Seine-Saint-Denis

Gabriel Amard, député du Rhône

Ségolène Amiot, députée de Loire-Atlantique

Pouria Amirshahi, député de Paris

Farida Amrani, députée de l’Essonne

Rodrigo Arenas, député de Paris

Raphaël Arnault, député du Vaucluse

Anaïs Belouassa-Cherifi, députée du Rhône

Ugo Bernalicis, député du Nord

Christophe Bex, député de la Haute-Garonne

Manuel Bompard, député des Bouches-du-Rhône

Louis Boyard, député du Val-de-Marne

Pierre-Yves Cadalen, député du Finistère

Sylvain Carrière, député de l’Hérault

Gabrielle Cathala, députée du Val-d’Oise

Sophia Chikirou, députée de Paris

Hadrien Clouet, député de la Haute-Garonne

Jean-François Coulomme, député de Savoie

Sébastien Delogu, député des Bouches-du-Rhône

Peio Dufau, député des Pyrénées-Atlantiques

Alma Dufour, députée de Seine-Maritime

Karen Erodi, députée du Tarn

Mathilde Feld, députée de la Gironde

Elsa Faucillon, députée des Hauts-de-Seine

Emmanuel Fernandes, député du Bas-Rhin

Sylvie Ferrer, députée des Hautes-Pyrénées

Marie-Charlotte Garin, députée du Rhône

Damien Girard, député du Morbihan

Perceval Gaillard, député de la Réunion

David Guiraud, député du Nord

Ayda Hadizadeh, députée du Val-d’Oise

Zahia Hamdane, députée de la Somme

Bastien Lachaud, député de Seine-Saint-Denis

Abdelkader Lahmar, député du Rhône

Maxime Laisney, député de Seine-et-Marne

Aurélien Le Coq, Député du Nord

Arnaud Le Gall, Député du Val-d’Oise

Antoine Léaument, Député de l’Essonne

Élise Leboucher, Députée de la Sarthe

Claire Lejeune, Députée de l’Essonne

Murielle Lepvraud, Députée des Côtes-d’Armor

Elisa Martin, Députée de l’Isère

Damien Maudet, Député de la Haute-Vienne

Marianne Maximi, députée du Puy-de-Dôme

Marie Mesmeur, députée d’Ille-et-Vilaine

Sandrine Nosbé, députée de l’Isère

Danièle Obono, députée de Paris

Nathalie Oziol, députée de l’Hérault

René Pilato, député de Charente

François Piquemal, député de Haute-Garonne

Thomas Portes, député de Seine-Saint-Denis

Loïc Prudhomme, député de Gironde

Jean-Claude Raux, député de Loire-Atlantique

Jean-Hugues Ratenon, député de la Réunion

Sandra Rego, députée du Bas-Rhin

Sandrine Roussea, députée de Paris

Arnaud Saint-Martin, député de Seine-et-Marne

Aurélien Saintoul, député des Hauts-de-Seine

Anne Stambach-Terrenoir, députée de la Haute-Garonne

Aurélien Taché, député du Val-d’Oise

Andrée Taurinya, députée de la Loire

Matthias Tavel, député de la Loire-Atlantique

Paul Vannier, député du Val-d’Oise

Dominique Voynet, députée du Doubs

Tribune publiée initialement dans l’Humanité