Etat d’urgence : la République suffoque

Etat d’urgence : la République suffoque

Le Premier ministre a annoncé ce matin vouloir prolonger l’état d’urgence de deux mois.

Cela fait maintenant 5 mois que le gouvernement a choisi – pour une efficacité très discutable – de déroger aux procédures judiciaires en matière de lutte anti-terroriste. Alors qu’aucune information sérieuse et probante n’a été communiquée récemment sur la mise en œuvre de l’état d’urgence , sur le nombre et l’efficacité des perquisitions, des assignations à résidence et des interdictions de manifester, force est de constater qu’une telle annonce parait uniquement destinée à faire perdurer un état général de peur collective et d’anesthésie sociale. La stratégie politicienne n’est pas loi…

En effet, monsieur Valls semble découvrir que l’Euro 2016 a lieu en France alors que c’est un événement qui se prépare depuis de nombreux mois. Bernard Cazeneuve avait pourtant régulièrement expliqué aux parlementaires que l’état d’urgence n’est absolument pas nécessaire pour mettre en œuvre les importantes mesures de sécurité qui sont de toute façon inhérentes à un événement de cette ampleur. Comme il l’a rappelé auprès des députés membres de la commission des Lois lors de la précédente prolongation, on n’a pas besoin de prolonger l’état d’urgence pour l’Euro 2016.

Une fois de plus, l’aveuglement néoconservateur du pouvoir le conduit à n’affirmer son autorité qu’à travers une vision policière de l’ordre public. C’est le signe d’une grande faiblesse. Une démocratie n’est forte que lorsqu’elle déploie toutes ses vertus pour assurer la cohésion nationale. Parmi elles, la Justice, capable de recueillir et d’utiliser rapidement des informations sensibles, de conduire des enquêtes, de prendre des mesures de protection tout en veillant au respect des droits de la personne. Ainsi, notre protection collective et nos libertés individuelles s’en trouveraient mieux garanties.

Il est temps de rebrancher la Justice à nos institutions, sous peine de voir la France s’enfoncer encore un peu plus dans les zones dangereuses du non-droit.

Je demande une fois de plus la levée de l’état d’urgence, qui accorde au pouvoir administratif, au Ministère de l’intérieur et à la police des prérogatives exorbitantes de droit commun, ce qui reste à mes yeux incompatible avec l’esprit républicain.