Sur votre site, vous dites que l’expulsion de Leonarda, une collégienne kosovare de 15 ans, est une violence faite à la République. Pourquoi?
La République est une machine à fabriquer de la citoyenneté. Et le cas de Leonarda est symptomatique car cette collégienne s’apprêtait à devenir une citoyenne. Son expulsion est à la fois immorale et stupide. Immorale car elle allait avoir son titre de séjour dans deux mois. Stupide car c’est de l’argent jeté par les fenêtres. Depuis quatre ans, l’Education nationale la formait à devenir une citoyenne française. Et en une décision, pour respecter des critères administratifs, on gâche tout ce travail. Au moment où l’on parle des Rom soi-disant inintégrables, on expulse aussi une jeune Kosovare qui était un exemple parfait d’intégration. J’espère qu’elle va revenir en France pour devenir une grande citoyenne. Comme certains de nos ministres qui sont passés par ce modèle-là.
En 2012, Manuel Valls a expulsé plus de sans-papiers que Claude Guéant en 2011. Comment l’expliquez-vous?
Je ne me l’explique pas. Les choses n’ont pas encore changé en profondeur. Mais il faut prendre à rebours l’opinion que l’on pense à tort xénophobe. Il faut assumer le débat. Nous sommes la cinquième puissance mondiale, notre exemple républicain est cité dans les livres d’histoire du monde entier. Et nous serions les seuls à ne pas vanter ce modèle. A un moment où l’Union européenne doute, où les Français ne connaissent même pas les 28 pays de l’UE, nous devons dialoguer au sujet de l’immigration. En disant les choses sereinement. Oui, l’Europe est importante. Mais nous partageons une langue, parfois de la famille avec tout une partie de l’Afrique qui regorge de talents, de cerveaux. Nous passons parfois à côté de nous-mêmes et de notre modèle d’intégration. Les Français aspirent à retrouver un récit républicain. Où est passé le rêve français de la campagne de François Hollande?
Le Président doit-il trancher la polémique entre le PS et Manuel Valls?
Je n’ai pas à interpeller le président de la République. J’attends que l’on retourne à l’esprit de ce qui a fait notre victoire, à l’esprit du Bourget. Et puisque certains se permettent de dire qu’être républicain, c’est respecter scrupuleusement les règles administratives, je me permets juste de dire autre chose. Fermer les frontières ou les ouvrir complètement? Il peut exister un débat qui ne soit pas binaire, notre peuple peut y réfléchir. Et nous devons le faire car nous sommes dans un moment historique où certaines choses sentent mauvais.