Ces dernières années, la situation politique en Guinée m’avait conduit, en tant que secrétaire national du parti socialiste, à prendre position suite aux massacres du stade de 2009 et aux évènements politiques qui s’en suivirent. L’élection du président Alpha Condé avait suscité des attentes fortes du peuple guinéen, et je me devais dans ce nouveau déplacement, de rencontrer les acteurs de la société civile et des ONG afin de connaître leur point de vue.
Mais l’essentiel de mon emploi du temps fut consacré à rencontrer nos compatriotes. J’étais accompagné par Richard Alvarez et Hassan Bahsoun, deux conseillers de gauche de la circonscription de Dakar ainsi que par Jean-Yves Leconte, sénateur des français de l’étranger. Merci à Ali, à François, à Rodolphe, à Laure, à Antonin et à toutes celles et ceux qui ont permis d’organiser ces nombreuses rencontres.
Conakry comptera bientôt 3000 français. Parmi eux, des chefs d’entreprises, des expatriés, des enseignants, des militaires, des résidents de longue date.
Et toutes les couleurs de la France, des couples mixtes aux bi-nationaux ou encore des jeunes volontaires internationaux pleins de projets dans les yeux.
Nous avons eu la chance de les rencontrer, nombreux, lors d’un débat organisé au centre culturel franco-guinéen (CCFG). Nous avons pu nous rendre compte que chacun ressentait l’importance de l’enjeu électoral qui s’annonce en France. L’image d’une France moins solidaire à cause des choix « économiques » du gouvernement et abîmée dans ses principes républicains est bien entendu arrivée jusque là. Nos compatriotes ont durement ressenti les 5 années de stigmatisations, de provocations humiliantes, de fermeture. Ils souhaitent, eux aussi, un changement profond, pour leur pays, mais aussi pour eux-mêmes, là où ils vivent. Comme ailleurs, ils ressentent les effets de la réduction de nos capacités dans nos services consulaires, de l’augmentation insupportable des frais de scolarité, de la sélection par l’argent qui s’est opérée durement pour l’accès aux soins et en particulier à la caisse des français de l’étranger. Ces échanges nous ont permis de présenter nos propositions, d’en débattre et de les enrichir des expériences de celles et ceux qui vivent ici. D’abord, celles liées aux 60 propositions de François Hollande, centrées sur le redressement industriel et culturel de notre pays. Ensuite, celles qui découlent de l’obligation de construire des rapports sincères de coopération, débarrassés des réseaux occultes mais surtout tournés vers le développement commun de l’Afrique et de l’Union européenne. Enfin, celles que nous défendons dans le monde entier pour rendre partout possible d’être français hors de France : préservation des titulaires de l’éducation, baisse des frais d’inscription, réformes de la Caisse des Français de l’étranger
pour une meilleure prise en charge de nos compatriotes, et mise en place d’une véritable stratégie d’accompagnement de nos entreprises quand elles créent des richesses et s’inscrivent concrètement dans une perspective de développement.
Riche d’un sous-sol aurifère, la Guinée est en capacité de répondre aux besoins de sa population. Cela dépend, d’abord, des choix économiques, fiscaux et sociaux de son gouvernement. Les prochaines élections législatives, prévues normalement le 9 juillet prochain, seront l’occasion, je l’espère, d’un grand débat national sur l’utilisation des ressources naturelles, son impact sur l’environnement et les redistributions dont tous doivent bénéficier, dans tous les secteurs : agriculture, énergie, services publics, etc. Mais les entreprises françaises peuvent apporter beaucoup : les chefs d’entreprises et cadres expatriés que nous avons rencontrés nous ont fait part de leurs disponibilité pour cela, en même temps que, parfois, un certain désarroi qui trouve son origine dans l’absence de véritable stratégie française, plus préoccupée par la « concurrence chinoise » que par l’utilisation intelligente de nos forces et de nos atouts.
Là encore, malgré le dévouement de nombreux français, qu’ils soient salariés du privé ou au service de l’Etat, on ne sent pas une grande vision française, sauf peut-être dans l’aide à la société civile.
Ce dévouement, j’ai pu le constater lors de la visite au consulat à la rencontre de nos agents. Ces derniers, malgré des réductions budgétaires, des inégalités de traitements et de statut parfois injustifiés entre eux, ne cessent de donner chaque jour le meilleur d’eux-mêmes.
Je pense aussi à cette formidable exposition organisée au CCFG sur le thème du métissage qui a rassemblé 2000 élèves de 5 établissements scolaires. Bravo aux organisateurs, aux chefs d’établissements, aux enseigants et particulièrement à Madame Nicole Morin qui a animé les stages de préparation et conçu une part de l’exposition.
Je dois aussi saluer la Maison de la Presse qui rassemble, depuis 3 ans, en un même lieu, les journalistes qui mettent en partage l’information et relaient auprès de l’opinion publique de Guinée les actions de la société civile : luttes des femmes, expressions culturelles, débats démocratiques entre pouvoir et opposition, revendications syndicales, enjeux écologiques, etc. C’est tout naturellement dans leurs locaux que nous avons organisé une conférence de presse. A noter au passage que ce projet a reposé principalement sur des financements français.
Pour conclure ce déplacement, nous avons eu la chance de dîner avec des français riches de leurs différences mais se sentant tous pleinement français : binationaux, couples mixtes, français expatriés, anciens résidents… Tous ces citoyens réunis… sans doute la meilleure réponse que nous pouvions apporter à 5 années de vision étriquée et de aux accents xénophobes. Ma France à moi, c’est celle-là.