Voici l’article paru dans The Dissident le 14 décembre 2015
Résultat des régionales : l’appel au réveil citoyen du Mouvement Commun
Après les résultats alarmants du premier tour des élections régionales, le député Pouria Amirshahi tire la sonnette d’alarme. Bien décidé à changer le système sur le long terme, il tente d’imposer dans le paysage français un lobby citoyen, contre-pouvoir influent et non partisan : le Mouvement Commun. Décryptage d’une initiative ambitieuse.
« Ces résultats étaient malheureusement attendus et ils confirment le vide et la dégénérescence d’un système ». Pouria Amirshahi, député des Français établis hors de France et frondeur notoire, ne mâche pas ses mots. Cette déliquescence de la vie politique, il la sent venir depuis déjà un certain temps. Loin des beaux discours, avec l’action comme leitmotiv, Pouria Amirshahi porte en lui le germe de la transgression. En novembre 2015, après plus de deux ans de réflexion et quelques tentatives, il crée le Mouvement Commun.
Le constat cuisant de l’échec des politiques traditionnelles
« En français, à notre tour, nous disons « nous pouvons », avance son appel. Un Podemos à la sauce tricolore donc, qui rassemble déjà de nombreux signataires, sans distinction d’âge, de catégorie sociale ou d’origine. « Notre économie est à bout de souffle, les partis traditionnels sont fatigués et fatigants et nous ne pouvons que constater que la tentation autoritaire du Front National s’affirme », déplore-t-il. Une situation qui n’a rien d’« une calamité tombée du ciel » mais qui est bel et bien, selon lui, la conséquence directe de l’inertie des politiques actuelles, notamment sur la question des inégalités.
S’il considère que cela fait bien longtemps que les médiateurs civils ne sont plus dans les radars des politiques, Pouria Amirshahi en appelle au « nous ».
Par cet appel, il entend porter un élan citoyen, uni et métissé, qui vise à rassembler, pour agir différemment.
Un mois après le lancement officiel du mouvement, ce dernier rassemble déjà plus de 2800 signataires, tous horizons confondus. Parmi les personnalités notables à avoir rejoint Mouvement Commun, on compte par exemple Pierre Laurent, Secrétaire général du Parti Communiste Français ou encore Cécile Duflot, la députée Europe Ecologie Les Verts.
Si des noms d’élus peuvent ancrer dans la réalité du combat politique un mouvement tel que celui lancé par Pouria Amirshahi, le but n’est cependant pas de créer un parti ou une quelconque formation politique à l’instar de celles déjà existantes.
Créer un lobby citoyen puissant
« Ce que nous venons de vivre, avec les régionales, c’est un véritable bras d’honneur électoral, une réponse politique », constate le député, qui affirme vouloir répondre par un éveil collectif. Le but ? « Inverser le rapport gouverné à gouvernant », en se rappropriant la chose commune, la chose politique.. Mais dans les faits, comment construire un contre-pouvoir influent sans enjeu électoral ?
« Construire un lobby citoyen, c’est créer un rapport de force, et remettre les décideurs à leur place ». Déjà plusieurs étapes ont déjà été franchies avec succès, selon le député frondeur. « Nous nous sommes mis d’accord sur des principes avec l’élaboration d’une charte. Nous avons rassemblé un arc politique, puisque nous représentons toute la gauche, et nous fonctionnons sur la base d’une pratique démocratique interne ».
Dans les actes, cela se concrétise en plusieurs étapes, dont la première a été mise en œuvre samedi 12 décembre, avec le lancement d’une web tv, pour assurer la diffusion d’un média politique. Au sommaire donc, du débat, une rubrique politique et un journal des bonnes nouvelles. Ensuite, il s’agira pour le Mouvement Commun de « faire campagne ». « Nous ne nous situons pas par rapport aux programmes des partis, nous créons le nôtre ». Un programme construit avec la société civile, puisque Pouria Amirshahi insiste, « nous rassemblons des citoyens très variés ».
« Remettre de la morale dans le discours politique »
« Nous avons perdu, et cela va être long. Car nous avons perdu plus que politiquement, nous avons perdu nos valeurs et tout est à reconstruire ». Dès qu’il est question du Mouvement Commun, Pouria Amirshahi oublie toute étiquette politique pour faire entendre sa voix de citoyen. Une voix pour l’avenir, face à un chantier qu’il juge « fastidieux » : « Tout est à reconstruire : la solidarité active, la souveraineté politique des citoyens, la liberté des médias ». Et c’est dans ce combat de longue haleine qu’il inscrit Mouvement Commun, voyant en ce projet citoyen ni plus ni moins que la « prolongation de la Révolution Française, à comprendre que ce fut le moment où l’on a enfin donné de l’importance à la citoyenneté ».
Dans les projets à court terme du Mouvement Commun, 2017 est évidemment en ligne de mire. L’ambition est d’avoir à cette échéance un projet concret à soumettre aux politiques. Mais 2017, c’est déjà demain, et Pouria Amirshahi le sait, le temps politique est un temps long, même si la rapidité de l’information tend à le faire oublier.
S’appuyant sur des gens très différents, aux parcours variés, qu’ils soient à la tête de réseaux influents ou simples électeurs déçus, le but du Mouvement Commun pourrait se résumer à vouloir « remettre de la morale dans le discours politique ». Pari ambitieux, Pouria Amirshahi ne s’en cache pas, mais il y croit.
Morgane Masson