L’article 2 du projet de loi d’orientation de l’Enseignement supérieur et de la Recherche – qui permet aux établissements de dispenser leurs enseignements entièrement en anglais – porte un coup terrible à la francophonie. En portant l’anglais comme condition de l’attractivité de nos universités, et en marginalisant le Français dans notre pays, c’est l’ensemble de l’espace francophone qui est fragilisé et affaibli.
Non, l’enseignement tout en anglais n’est pas nécessaire pour attirer des étudiants des pays émergents – de l’Inde au Brésil en passant par la Turquie ou la Corée – qui comptent, en leur sein, suffisamment de jeunes diplômés francophones ou désireux de le devenir.
Non l’enseignement tout en anglais n’est pas une chance pour la recherche française mais une condamnation, à l’heure où la recherche francophone, toutes disciplines confondues, étouffe de la pression, quasi-obligatoire, des revues anglophones.
Si la France veut être attractive, alors il est temps qu’elle contribue à la formulation d’une nouvelle ambition francophone. Bien des peuples amis sont disponibles, demandeurs et même parfois en avance sur ce chemin ! Parmi eux, l’Algérie, pourtant non membre de l’OIF, la Belgique, le Canada, le Maroc, la Côte d’Ivoire, la Suisse, le Sénégal, la Tunisie et bien d’autres encore. Il existe un espace francophone véritable, à la fois d’échanges scientifiques, culturels et diplomatiques. Il existe aussi une francophonie économique, tournée vers le développement et le partage de la valeur ajoutée entre le Nord et le Sud.
Pour attirer dans ses universités, la France doit promouvoir, comme la gauche en a l’intention, une politique centrée sur la qualité des enseignements, de la recherche et des équipements.
Plutôt que de composer avec une langue, l’Anglais, qui ne mérite certes pas l’opprobre mais n’a certainement pas besoin d’une telle soumission pour exister, donnons à la Francophonie ces outils dont elle manque cruellement : pourquoi ne pas, enfin, reprendre cette idée d’un Erasmus francophone ? Pourquoi ne pas promouvoir l’idée d’un « passeport économique et culturel de la francophonie » destiné à instaurer, dans cet espace, une mobilité sans entrave aux étudiants, scientifiques, artistes, chercheurs, chefs d’entreprises.
La langue française n’a pas à s’excuser. Portée avec l’audace des grandes passions, elle peut rassembler des peuples qui ont avec elle un trésor commun qu’il nous faut chérir et cultiver.
À l’instar de nombreuses associations de défense de la langue française du monde entier et de l’Académie française, je suis favorable au retrait de cet article 2.