Pénibilité : quid de la retraite des salariés soumis aux agents chimiques mortels ?

« La gravité et la noblesse d’un débat comme celui-ci tiennent au fait que nous parlons de la vie des gens. L’enjeu, et cela vaut pour ce projet peut-être plus que pour tout autre, c’est que nous avons entre nos mains une part de la destinée de nos citoyens, y compris sur le plan individuel. L’effet de cette réforme se projettera en effet sur plusieurs générations. Évidemment, lorsqu’on parle de retraite, on parle de droits universels – c’est en tout cas ce que nous souhaitons sur les bancs de la majorité – mais on touche également concrètement à la réalité de la vie des gens.

N’en déplaise à M. Gattaz, qui s’étonnait l’autre jour que le Gouvernement et la majorité inscrivent au cœur de cette réforme la question de la pénibilité, le travail n’est malheureusement pas toujours émancipateur, même si ce devrait être le cas. Pour des millions de personnes, le travail s’effectue dans des postes difficiles, avec des heures, des journées, des semaines et parfois même des années pénibles. Et M. Gattaz, dont je ne savais pas que vous étiez l’avocat, monsieur Robinet, serait bien avisé de tenir compte de ce qui est rapporté par l’ensemble des organisations syndicales, y compris certains représentants de petites et moyennes entreprises, sur ce que vivent en réalité de nombreux salariés.

Permettez-moi d’illustrer mon propos avec l’exemple des salariés de l’usine de la Saft située à Nersac, en Charente, où j’ai habité durant quelques années. Ils sont pour leur part exposés au cadmium, au nickel, c’est-à-dire à ces métaux lourds qui entrent en particulier dans la composition des accumulateurs de pile. Il se trouve que sur les trois cents salariés que compte l’usine, quatre-vingt ont déjà été déclarés inaptes au travail, sont dans une situation très difficile et ne peuvent pas espérer, comme les autres, une retraite digne, une retraite longue.

J’aimerais que tous ici, et naturellement au premier chef le Gouvernement, nous nous interrogions sur la façon dont ces professions sont prises en compte dans notre réforme des retraites, afin d’éclairer nos débats.

Comment faire en sorte que la situation de ces salariés qui cumulent l’exposition à ces agents chimiques très dangereux avec une organisation du temps de travail difficile – horaires de nuit et horaires décalés, notamment – soit distinctement et clairement prise en compte dans la réforme afin qu’ils puissent tous, au terme de leur carrière, être acquittés de leurs droits et constater qu’au moins la société leur rend une part du lourd tribut qu’ils ont payé ? »