L’Assemblée nationale examine cette semaine le projet de loi de procédure pénale intitulé « de lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement ».
J’avais déposé avec mes collègues un certain nombre d’amendements que j’ai défendus lors de leur examen en séance.
Instauration d’un récépissé lors des contrôles d’identité
Cet amendement vise à instaurer un récépissé lors des contrôles d’identité, lequel doit identifier l’agent de la police nationale ou le militaire de la gendarmerie nationale qui l’a déclenché et pourra être utilisé par la personne enregistrée pour faire valoir ce que de droit.
Selon le rapport 2009 de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH), se basant sur une étude menée, entre octobre 2007 et mai 2008, dans deux gares parisiennes de grande affluence, par des chercheurs du CNRS, « les personnes perçues comme « Noires » couraient entre 3,3 et 11,5 fois plus de risques que celles perçues comme « Blanches » d’être contrôlées par la police. Les personnes perçues comme « Arabes » couraient entre 1,8 et 14,8 fois plus de risques que les supposés « Blancs ». Cette étude illustre la dimension souvent discriminatoire des contrôles d’identité remettant en cause notre commune citoyenneté française. En effet, le contrôle d’identité est aujourd’hui le seul acte de police qui ne laisse aucune preuve écrite. Cette mesure vise ainsi à prévenir les contrôles abusifs, et qui enfreignent le principe d’égalité entre les citoyens.
Appliqué en Grande-Bretagne depuis 1984, il est expérimenté dans certains États américains, au Canada mais aussi en Espagne et en Bulgarie. Ces expériences ont démontré une baisse des contrôles d’identité pour une efficacité doublée. Enfin, loin de ternir l’image des forces de l’ordre, cette mesure a eu pour conséquence de renforcer le lien de confiance entre les forces de l’ordre et la population.
Voici deux extraits de mes interventions à ce sujet :
« C’est un fait établi, chacun le voit, et d’abord ceux qui le subissent, que beaucoup des contrôles d’identité sont des contrôles au faciès. Ceux qui le subissent en ont témoigné suffisamment pour que le candidat Hollande prenne la responsabilité de délivrer ce qui était une revendication très novatrice de la jeunesse des quartiers : un récépissé de contrôle d’identité.
J’ai rencontré des policiers londoniens, madrilènes de bulgares qui l’ont mise en place après une grand réticence. Après expérimentation, ils en sont tous satisfaits. Ils disent que d’une part cela a apaisé les tensions entre les jeunes et la police, or vous savez monsieur le ministre le degré de tension qui existe aujourd’hui dans certaines zones entre la police et une partie de notre jeunesse, vous savez parfaitement le sentiment et le vécu de discrimination d’une partie de la jeunesse française. Ce n’est pas une question de classe sociale, c’est bien une question de faciès. Et ces policiers trouvent d’autres vertus à cette disposition : ils peuvent se concentrer de nouveau sur leurs missions essentielles : des filatures, des investigations, de la circulation.
Cette disposition du récépissé a fait sa preuve dans ces pays. »
Suppression de l’article 18 du projet de loi qui rend possible la retenue d’une personne pendant 4 heures pour vérification de la situation administrative
Cet amendement vise à supprimer l’article 18 du projet de loi qui permet aux forces de l’ordre, à l’occasion d’un contrôle ou d’une vérification d’identité, de retenir une personne qui a justifié de son identité, « lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement est lié à des activités à caractère terroriste ou qu’elle est en relation directe et non fortuite avec une personne ayant un tel comportement ».
Cet article permet de retenir toute personne sans justification alors même que cette dernière a été en mesure de justifier de son identité. Cet article menace donc les libertés fondamentales propres à chaque citoyen et ignore le fonctionnement de toute procédure judiciaire, basée sur la présomption d’innocence.
Par ailleurs, la formulation large et imprécise de l’article (« raisons sérieuses de penser que son comportement est lié à des activités à caractère terroriste » ; « en relation directe et non fortuite avec une personne ayant un tel comportement ») peut être à l’origine de retenues arbitraires de la part des forces de l’ordre chargées du contrôle.
Enfin, cet article ne prévoit pas explicitement la possibilité d’informer son avocat, de s’entretenir avec lui, ni son assistance. Or, l’équité d’une procédure pénale en conformité avec les standards européens requiert que toute personne jouisse de la possibilité de se faire assister par un avocat, dès qu’elle fait l’objet d’une retenue par des autorités administratives ou judiciaires.
Voici l’extrait de mon intervention à ce sujet :
Retrouver le détails de mes amendements à ce projet de loi