J’ai participé mardi 9 février au débat en séance relatif à l’Article 47 du projet de loi pour l’activité, la croissance et l’égalité des chances économiques, présentée par le Ministre de l’économie Emmanuel Macron.
Cet article a pour objectif la création d’un champion européen de l’armement terrestre, par l’union à parité des deux grands groupes européens Nexter system et Krauss–Maffei Wegmann (KMW). Ce projet nécessite la création d’une structure passant par GIAT industries détenue à parts égales par l’Etat Français et la famille Wegmann. Pour cela, il faudra privatiser GIAT à hauteur de 50%.
J’ai souhaité soulever trois points qui me semblent majeurs :
D’une part, le risque de perdre notre souveraineté sur une industrie de pointe dans une Union Européenne dont le projet stratégique, même si nous souhaitons le voir émerger, est pour le moment inexistant. Or, la simple dérégulation d’un tel secteur ne permettra pas l’émergence d’une véritable politique de sécurité et de défense commune sans la mise en place d’un cadre rigoureux au préalable. C’est pourquoi il est absolument nécessaire de mettre en place un véritable débat autour de ce projet, qui relève avant tout des enjeux stratégiques et de défense français. L’industrie de la défense a un particularisme fort : elle est liée à une déontologie, à une cohérence de notre politique de défense, et est dotée d’un encadrement spécifique dont nous ne pouvons prendre le risque de briser le cadre sous prétexte d’un manque de financements publics.
Cela m’amène à mon deuxième point : Bien que dans ce processus l’Etat détienne encore toute autorité sur les ventes par un actionnariat à hauteur de 50%, la semi-privatisation fragilise le processus décisionnel et l’Etat peut alors subir les pressions des actionnaires, ou encore des délocalisations, restructurations et suppression d’effectifs pour y substituer de la sous-traitance à des entreprises qui ne seraient pas françaises. Cet article fragilise donc de manière importante l’industrie de la défense française qui est ici à tort considérée comme tout autre secteur de l’économie française, considérant les enjeux majeurs qui en relèvent.
Enfin, je doute de la pertinence stratégique d’une telle alliance « industrielle » franco-allemande dès lors que l’Allemagne et la France n’ont pas de politique étrangère convergente ni la même approche en matière d’opération extérieure. Je ne voudrais pas qu’il soit dit demain que, pendant que les uns font la guerre, les autres font de l’argent.
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