Stop à la Directive « Secret des Affaires »

Un projet de directive a été adopté par la commission des affaires juridiques du Parlement européen. Ce texte, qui sera examiné en séance plénière à la rentrée, qui vise à lutter contre l’espionnage industriel, inquiète les journalistes. Le secret des affaires a certes pour but d’éviter l’espionnage industriel mais il va surtout entraver le travail des journalistes. Cette mesure remettra ainsi en cause la possibilité d’enquêter sur les banques, les grandes entreprises, ou encore les laboratoires pharmaceutiques sous prétexte de tomber sous le coup de « l’espionnage industriel » et devoir payer des amendes exorbitantes. Loin d’être un combat corporatiste de journalistes pour défendre les journalistes, il s’agit ici de défendre un modèle de société où les citoyens ont le droit d’être informés sur les sujets qui les concernent.

Elise Lucet, journaliste de France 2, a lancé une pétition contre cette directive qui a déjà recueilli plus de 300 000  signatures. J’encourage toutes celles et ceux qui défendent une société dans laquelle la liberté de la presse est entière à y apporter leur signature.

Vous retrouverez le texte de la pétition ci-dessous, vous pouvez la signer ici

 

 

Ne laissons pas les entreprises dicter l’info – Stop à la Directive Secret des Affaires !

Bientôt, les journalistes et leurs sources pourraient être attaqués en justice par les entreprises s’ils révèlent ce que ces mêmes entreprises veulent garder secret. A moins que nous ne réagissions pour défendre le travail d’enquête des journalistes et, par ricochet, l’information éclairée du citoyen.

Sous couvert de lutte contre l’espionnage industriel, le législateur européen prépare une nouvelle arme de dissuasion massive contre le journalisme, le « secret des affaires », dont la définition autorise ni plus ni moins une censure inédite en Europe.

Avec la directive qui sera bientôt discutée au Parlement, toute entreprise pourra arbitrairement décider si une information ayant pour elle une valeur économique pourra ou non être divulguée. Autrement dit, avec la directive « Secret des Affaires », vous n’auriez jamais entendu parler du scandale financier de Luxleaks, des pesticides de Monsanto, du scandale du vaccin Gardasil… Et j’en passe.

Notre métier consistant à révéler des informations d’intérêt public, il nous sera désormais impossible de vous informer sur des pans entiers de la vie économique, sociale et politique de nos pays. Les reportages de « Cash Investigation », mais aussi d’autres émissions d’enquête, ne pourraient certainement plus être diffusés.

Avec ce texte, un juge saisi par l’entreprise sera appelé à devenir le rédacteur en chef de la Nation qui décide de l’intérêt ou non d’une information. Au prétexte de protéger les intérêts économiques des entreprises, c’est une véritable légitimation de l’opacité qui s’organise.

Si une source ou un journaliste « viole » ce « secret des affaires », des sommes colossales pourraient lui être réclamées, pouvant atteindre des millions voire des milliards d’euros, puisqu’il faudra que les « dommages-intérêts correspond(ent) au préjudice que celui-ci a réellement subi ». On pourrait même assister à des peines de prison dans certains pays.

Face à une telle menace financière et judiciaire, qui acceptera de prendre de tels risques ? Quel employé – comme Antoine Deltour à  l’origine des révélations sur le  le scandale Luxleaks – osera dénoncer les malversations d’une entreprise? Les sources seront les premières victimes d’un tel système, mais  pas un mot ne figure dans le texte pour assurer leur protection.

Les défenseurs du texte nous affirment vouloir défendre les intérêts économiques des entreprises européennes, principalement des « PME ». Étonnamment, parmi  celles qui ont été en contact très tôt avec la Commission, on ne relève pas beaucoup de petites PME, mais plutôt des multinationales rôdées au lobbying : Air Liquide, Alstom, DuPont, General Electric, Intel, Michelin, Nestlé et Safran, entre autres.

Ces entreprises vont utiliser ce nouveau moyen offert sur un plateau pour faire pression et nous empêcher de sortir des affaires …

Vu l’actualité Luxleaks, nous ne tolérons pas que nos élus se prononcent sur un texte aussi grave pour la liberté d’expression sans la moindre concertation avec les représentants de la presse, les lanceurs d’alertes et les ONG.  Seuls les lobbies industriels ont été consultés.

Nous, journalistes, refusons de nous contenter de recopier des communiqués de presse pour que vous, citoyens, restiez informés. Et comme disait George Orwell : « Le journalisme consiste à publier ce que d’autres ne voudraient pas voir publié : tout le reste n’est que relations publiques ».

C’est pourquoi je demande, avec l’ensemble des signataires ci-dessous, la suppression de cette directive liberticide.

 

 

Pétition soutenue par :  

Informer n’est pas un délit
https://www.facebook.com/informernestpasundelit
@collectif_INPD

Franck Annese – SO PRESS

Fabrice Arfi – Mediapart

Guilaine Chenu – Envoyé spécial (France 2)

Patrick Cohen – France Inter

Christophe Deloire – Reporters sans Frontières

Antoine Deltour – lanceur d’alerte LuxLeaks

Hervé Falciani – lanceur d’alerte HSBC

Stéphanie Gibaud – lanceuse d’alerte UBS

Eva Joly – Députée européenne

Marie de La Chaume – Pièces à conviction (France 3)

Laurent Léger – Charlie Hebdo

Paul Moreira – Premières Lignes Télévision

Edouard Perrin – Premières Lignes Télévision

Edwy Plenel – Mediapart

David Pujadas – France 2

Denis Robert – Ecrivain

Pierre-Antoine Souchard – Association de la Presse judiciaire